La chronique de droit d’Avocadys*

Covid-19 et congés payés : Comment ça marche ?

Par la loi d’urgence du 23 mars 2020, le législateur a autorisé le gouvernement à adopter par voie d’ordonnance des dispositions dérogatoires en matière de prise des congés payés pour adapter au mieux le temps de travail des salariés aux besoins des entreprises.

L’ordonnance du 25 mars 2020 autorise votre employeur à vous imposer des congés payés ou encore à modifier la date de congés déjà validés sans être obligé de respecter les délais de prévenance prévus par le Code du travail ou les accords collectifs1.

Pour autant, cette possibilité reste encadrée et l’employeur ne peut pas en décider seul. Les règles dérogatoires nécessitent la conclusion d’un accord collectif soit au sein même de l’entreprise, soit au niveau de la branche d’activité. Ainsi seul un accord d’entreprise, ou, à défaut, un accord de branche, c’est à dire un accord issu d’une négociation entre les partenaires sociaux composés de représentants des employeurs et de représentants des salariés, peut déterminer les conditions dans lesquelles l’employeur est autorisé à imposer ou à déplacer les dates de congés en dérogeant aux conditions prévues par le Code du travail ou stipulations conventionnelles applicables à l’entreprise.

La période de dérogation fixée ne peut pas s’étendre au-delà du 31 décembre 2020. En revanche, l’accord collectif dérogatoire peut prévoir que la possibilité d’imposer la prise de jours de congés payés, s’applique y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ces congés ont normalement vocation à être pris, soit dans la plupart des cas, avant le 1er mai 2020. Le nombre de jours concernés par l’accord collectif dérogatoire : seuls 6 jours de congés maximum peuvent être concernés parmi ceux vous restant à prendre au titre de la période précédente (compteur « N-1 ou acquis » sur le bulletin de salaire) ou parmi ceux en cours d’acquisition (compteur « N ou en cours d’acquisition » sur le bulletin de salaire). Le délai de prévenance fixé par l’accord collectif dérogatoire : au moins un jour franc2.

En cette période de confinement, il est néanmoins peu probable que des accords collectifs visant à déroger aux règles de prise des congés payés soient adoptés en masse.

En l’absence d’accord collectif dérogatoire les règles posés par le Code du travail sont en temps normal les suivantes :

Après avis du Comité Social et Economique3 lorsqu’il existe, l’employeur définit la période de prise des congés (au minimum entre le 1er mai et le 31 octobre). Il en informe les salariés au minimum deux mois avant le début de cette période et fixe l’ordre de départ en congés des salariés de l’entreprise. Sauf circonstances exceptionnelles, l’employeur ne peut modifier l’ordre et les dates de départ en congés moins d’un mois avant la date de départ prévue. Chaque situation étant particulière, toute interrogation sur l’application de ces règles et des exceptions qui s’y rapportent, est légitime. N’hésitez pas à consulter un professionnel du droit qui saura vous conseiller au mieux de vos intérêts.

1 Accord collectif : accord d’entreprise s’il est négocié au sein de l’entreprise, ou à défaut, accord de branche également dénommé convention collective s’il est négocié au sein de la branche d’activité.

2 Un délai franc est un délai décompté en jour entier de 0h à 24h. Il commence donc à courir le lendemain du jour où vous apprenez la modification ou le positionnement de vos congés.

3 Le CSE est obligatoire dans toute entreprise de 11 salariés et plus.

Exercer son droit de retrait du fait du coronavirus : quand, comment, quelles conséquences ?

Le droit de retrait d’un salarié lui permet d’interrompre son travail et de quitter son poste en cas de danger estimé comme grave et imminent pour sa santé et sa sécurité.

La notion de danger grave et imminent est nécessairement subjective, mais elle sera appréciée au besoin par le Conseil de prud’hommes, au cas par cas, et toujours du point de vue du salarié. Il suffit que le salarié ait légitimement eu un motif raisonnable de penser que le danger était grave et imminent pour que le droit de retrait soit considéré comme justifié. Pour le ministère du travail, si l’ensemble des recommandations sanitaires du gouvernement sont mises en œuvre au sein de l’entreprise, le droit de retrait pourrait ne pas être justifié. Cependant, seul le juge prud’homal est compétent pour en décider. Il n’existe pas à ce jour de décision rendue en la matière concernant le risque de contamination Covid 19.

Comment ? Il convient d’alerter immédiatement l’employeur. Si la loi ne prévoit aucun formalisme particulier pour le faire, il est préférable de faire un écrit (sms, mail, courrier remis en main propre à l’employeur contre date et signature). S’il existe un CSE (anciennement délégué du personnel/comité d’entreprise), prévenez également un membre représentant du personnel de l’exercice de votre droit de retrait. Il sera alors notifié sur le registre prévu à cet effet dans l’entreprise.

Quelles conséquences ? L’exercice légitime du droit de retrait ne doit entraîner aucune retenue de rémunération ni aucune sanction. Le salaire doit être maintenu et le salarié ne peut être contraint de reprendre son poste de travail tant que l’employeur n’a pas pris les mesures nécessaires pour faire cesser le danger.

Vous vous exposez cependant à ce que des sanctions disciplinaires pour absence injustifiée, doublées d’une retenue sur salaire, soient prononcées à votre encontre par votre employeur.

Si tel était le cas, vous pouvez contester ces mesures en saisissant le Conseil de prud’hommes, y compris dans le cadre d’une audience de référé pour demander à titre de provision, le paiement des salaires retenus par votre employeur.

Chaque situation étant particulière, n’hésitez pas à consulter un professionnel du droit.

1 Les recommandations sanitaires générales du gouvernement face au coronavirus : la mise en place du télétravail autant que faire se peut et limiter les déplacements professionnels ; assurer le respect par les salariés des gestes barrières (se laver les mains régulièrement, respecter une distance minimale d’un mètre, tousser/éternuer dans son coude, utiliser des mouchoirs à usage unique) ; aménager les postes de travail pour permettre une distance d’un mètre entre les salariés.

* SELARL AVOCADYS
Agnès PAILLONCY
Avocat
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